L'art subtil de s'en foutre

"S’en foutre" ne signifie pas ne se soucier de rien, mais plutôt de soucier uniquement des choses qui ont de l’importance, qui rejoignent nos valeurs.

Publié le 2 nov. 2024

Où que vous alliez, il y a des emmerdes qui vous attendent : le truc, c’est de trouver les emmerdes motrices, celles qui donnent envie d’avancer et de t’investir. Il n’est d’ailleurs pas possible de s’en foutre “de tout” sans distinction : il existe toujours quelque chose dont on ne se fout pas (et dans le cas contraire, on passe pour un gros psychopathe).

La solution à un problème ne fait qu’en créer un autre, auquel nous accorderons une importance plus ou moins prioritaire qu’au précédent. N’attendez pas une vie sans problème : cela n’existe pas. Souhaitez vous une vie pleine de bons problèmes.

Peur du conflit

Ceci rejoint la « peur du conflit » dont il était question à d’autres moments - à aucun moment, tout le monde ne pourra être d’accord : le conflit, c’est le vie, et c’est la base de tout changement.

Souffrance

La souffrance a une fonction biologique : elle est l’acteur du changement préféré de la nature.

“La vie tout entière est une forme de souffrance : les riches souffrent de leur richesse, les pauvres de leur pauvreté, les personnes sans famille de ne pas en avoir, celles qui en ont une souffrent à cause d’elle, les gens en quête de plaisirs matériels en s’offrent et ceux qui y renoncent souffrent de leur renoncement. »

Les diverses formes de souffrance ne sont pas équivalentes pour autant ; il y a une question de degré : certaines sont plus douloureuses que d’autres, mais personne n’y échappe. Des études ont notamment prouvé que le cerveau ne faisait pas de différence entre la souffrance physique et psychologique : se cogner un doigt de pied peut être aussi douloureux que de se faire plaquer/tromper.

Pour avancer, la solution consiste à résoudre ses problèmes.

Se sentir en dessous de tout, pointe un problème non résolu ; c’est un appel à l’aide [de notre cerveau] pour passer à l’action, pour faire quelque chose. Les émotions positives font pareil, et la vie te semble archi simple quand tu les ressens, et il n’y a qu’à en profiter. Puis, elles disparaissent quand un nouveau problème se pointe, et on est reparti.

Positivité des expériences

L’aspiration à vivre des expériences plus positives est en soi une expérience négative. Et, paradoxalement, consentir à vivre les expériences négatives qui se présentent ou s’imposent à nous constitue en soi une expérience positive.

La tyrannie de l’exceptionnel

« Non seulement tu es plombé par des problèmes insolubles, mais il faut par-dessus le marché que tu te réveilles dans la peau d’un loser de panière parce qu’une banale requête sur Google t’a mis sous les yeux des milliers de personnes qui n’ont pas tes problèmes ».

En gros, nous sommes dans une époque où une énorme masse d’information nous est mise à disposition gratuitement au travers d’internet ; les média n’ont alors comme possibilité (et comme liens putaclics) de nous fournir uniquement l’exceptionnel, la part de 99.999%. En étant « simplement moyen », nous nous sentons totalement nuls d’être abreuvés de tant de choses exceptionnelles.

Il n’est pas possible d’être bon partout ; un sportif de haut niveau pourra être totalement con, une pop star au niveau intellectuel d’une huitre ou un musicien de génie totalement antisocial. Être dans la norme » est suffisant - (cf. Rework : « good is good enough »), et essayer d’être exceptionnel - comme nous le matraque les média et les réseaux sociaux - fait souffrir.

Valeurs

La question que nous devons nous poser est : pour quoi / quelles causes sommes-nous prêts à souffrir ? Ce dernier point rejoint nos valeurs, et pour les faire ressortir, le plus simple est de penser à un truc qui nous ennuie, et de nous poser les questions suivantes :

Quand tu as des valeurs à la con, quand tu te fixes des critères à la con et te compares aux autres, tu t’emmerdes pour des trucs sans importance, des trucs, qui, en fait, te rendent la vie encore plus merdique.

Le développement personnel consiste à accorder la priorité à des valeurs plus terre-à-terre, basées sur la réalité, socialement constructives et immédiatement contrôlables, et à choisir de focaliser son attention sur des choses qui en valent beaucoup plus la peine. Parce que ce faisant, nous nous confrontons à de meilleurs problèmes (et notre vie s’en trouve améliorée - et simplifiée).

Aspirer à l’harmonie est finalement un rêve un peu baba cool que l’on ne pourra jamais atteindre autrement qu’en s’occupant activement de chaque problème touchant à nos valeurs.

Responsabilité

L’important est de garder la responsabilité de vos choix et de ce qu’il vous arrive :

Nous sommes constamment responsables d’expériences qui ne sont pas de notre faute : cela fait partie de la vie. Il est possible d’accuser plein de gens des malheurs qui vous arrivent, mais la responsabilité vous incombe. Revendiquer la responsabilité de ses propres problèmes est une autre paire de manches, mais les enseignements que nous pouvons en tirer sont d’autant plus précieux.

Il convient de bien distinguer la faute de la responsabilité :

« La faute se conjugue au passé ; la responsabilité se conjugue au présent ».

Comment

La prise de conscience de notre finitude garantit que nous ne pourrons jamais tout assumer et tout gérer. Il faut choisir ses valeurs, ses combats. Au fur et à mesure que nous réévaluerons nos valeurs, nous éprouverons des résistances intérieurs et extérieures. En prendre conscience, c’est déjà y prêter attention.

A chaque instant, nous sommes constamment en train de choisir ce à quoi nous tenons. Changer de priorité est aussi simple que de choisir ce à quoi nous voulons tenir.

Comment avoir moins de certitude sur toi-même ?

Ces trois questions constituent un test décisif qui va aider à déterminer si nos valeurs tiennent la route ou si nous sommes des connards finis. La réalité est là : si tu as l’impression que c’est toi contre le reste du monde, c’est généralement parce que c’est toi contre toi-même.

La suite, c’est qu’en sachant et en ayant digéré notre finitude, il est beaucoup plus “facile” de prendre des décisions en se projetant dans l’avenir : qui s’en souviendra dans 100, dans 500 ans ? Quelles seront les conséquences réelles ?

Il y a la peur de l’échec - due à l’aseptisation du système scolaire, la mise sous cloche des parents et le matraquage des média. Sauf que pour réussir quelques part, il faut 500, 5000 ou 50 000 heures d’apprentissage, d’essais, d’erreurs : refuser l’éventualité de l’échec revient à fermer la porte à toute possibilité de réussir.

Pour ne pas avoir peur de se planter, le critère de réussite est « agir », que l’on peut aussi schématiser sous “qu’importe la destination, l’important est le voyage”.

Faites quelque chose. N’importe quoi. Mais sans procrastination. Le reste suivra.

Le succès ne s’arrête pas à un objectif que l’on se fixe, mais à l’expression sincère liée à la joie d’enfant d’accomplir quelque chose de bien. Picasso a vécu jusqu’à plus de 90 ans. Si son objectif avait été « d’être célèbre », il ne serait pas devenu ce quil a été, avec ses multiples périodes successives, en perpétuel renouvellement créatif.

Les plus belles victoires sont celles que nous avons remportées de haute lutte contre l’adversaire, pour lesquelles nous en avons chier des ronds de chapeaux.

Confiance

La souffrance qu’il t’arrive d’éprouver dans le cadre d’une relation est nécessaire, et agit sur la confiance mutuelle. Chacun doit pouvoir exprimer ouvertement son désaccord, sa désapprobation, son refus, dire et entendre dire non.

La confiance est l’ingrédient principal d’une relation, sachant qu’une fois perdue, il faut beaucoup plus de temps pour regagner la confiance qu’il n’en a fallu pour la réduire à néant.

Et à la fin, tu meurs

La mort peut nous terrifier, et comme elle terrifie, on en élude l’idée, on évite d’y penser et d’en parler ou parfois de l’admettre Paradoxalement, la mort est la lumière qui fait ressortir la pénombre du sens de l’existence. Sans la mort, que pèseraient nos expériences, nos critères de mesure, nos valeurs ? Que dalle.

Les humains - par rapport aux autres animaux - ont une capacité d’abstraction et la possibilité de se projeter dans ses situations hypothétiques. Nous avons ainsi deux « moi » :

« La peur de la mort découle de la peur de vivre » ( Mark Twain)

Annexes

Adaptation hédonique : se décarcasser pour améliorer une situation, et au final ne pas voir de différences. D’où la récurrence et l’inévitabilité de nos problèmes.

Loi de l’effort inverse : au plus tu veux de la certitude, au plus tu vas t’enfoncer dans l’incertitude et l’insécurité.

Paradoxe du choix : la société de consommation s’y entend dès qu’il s’agit de nous proposer toujours plus. Le message implicite derrière toute publicité est « plus, c’est toujours mieux ». Mais plus on nous propose d’options, moins on est satisfait de notre choix car on garde en tête toutes les autres possibilités auxquelles nous avons renoncé. Entre deux choix, il sera facile (normalement) de faire un tableau des avantages et inconvénients. Entre une dizaine ou une vingtaine, ce sera nettement plus compliqué, voire impossible. Et ça sera une purge psychologique. En enchaînant des expériences les plus diverses, le « rendement » s’amenuise petit à petit - il n’y a des sensations qu’on ne découvre ou qui ne sont procurées qu’après plusieurs années d’engagement.