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La vérite sur l'affaire Harry Quebert

·538 mots·3 mins
Joël Dicker

Pour être honnête, la couverture n’inspirait absolument pas confiance. Cela sentait les vacances, avec des couleurs pastels, un petit village champêtre, son église, un joli ciel bleu… Tout pour faire penser à une belle histoire d’amour copiée du dernier Marc Levy. En plus de cela, les 860 pages de mon édition de poche laissaient franchement penser que je le lâcherais avant même la fin de la première partie.

Perdu.

Passé les deux premiers chapitres, tout se met en place et s’accélère. De nouveaux évènements interviennent après chaque vague émotionnelle, on est immergé de plein gré dans une histoire qui nous dépasse, où chaque détail à son importance et où l’auteur semble prendre un malin plaisir à embrouiller volontairement grâce à une mise en abîme temporelle savament orchestrée.

On s’accroche, on s’identifie aux personnages. Chacun d’entre eux cache quelque chose. On le sait, on le sent, mais on n’arrive pas réellement à mettre la main sur ce qui cloche. On sait que cela va déraper, sans jamais réellement mettre le pourquoi. Ou alors pour mieux glisser quelques pages plus loin.

Chaque détail va mettre la puce à l’oreille; on se met méfie de tout le monde, sans réellement y croire vu la quantité de pages restantes. Celle-ci se réduit de plus en plus, jusqu’au dénouement final, celui qu’on attendait, qu’on soupçonnait peut-être, mais qui s’avera finalement libérateur tant les dénouements, changements de rhytme et rebondissements sont fréquents. C’est une ôde à l’amour, au fonctionnement des instincts humains primaires. On passe de la répulsion à la compréhension en quelques pages seulement: l’auteur introspecte. On s’attache et se détache des personnages comme on tourne les pages: les nouveaux évènements apportent de la fraîcheur, des réponses et de nouvelles interrogations. Après l’avoir lu, on a un peu l’impression que chaque page, dialogue ou introduction y a sa place, que chaque information ou discussion aura une suite et on fait attention à chaque miette que l’auteur aura la bonté de laisser derrière lui et qu’il aura dispersé parmi toutes ces phrases et paragraphes. On se prend finalement au jeu du roman, en espérant en avoir encore un peu par après, en espérant que la prochaine page ne contiendra pas l’un de ces clichés ou facilités autorisées par l’écriture.

D’habitude, une histoire se subit: on se laisse porter par le flot des dialogues, à attendre qu’un évènement se passe. Ici, on se surprend à inventer et imaginer la suite, à porter des soupçons, à espérer qu’un évènement se produise. C’est là aussi tout le désespoir ce roman, c’est qu’il se passe simultanément dans le passé et dans le présent. Le présent fait place à un réel suspens. Ce qui arrive actuellement, la pression mise par certains personnages, la rancune tranmise par d’autres sont réellement ressenties, mais laissent place à d’autres sentiments une fois évaporées. Le passé est passé, on en connait la fin dès les premières pages, mais on se prend quand même à espérer qu’il soit faux ou partiellement incorrect, que des indices laissent à penser que… peut-être qu’on se trompe? Peut-être que tout ça ne s’est jamais passé? Peut-être que l’auteur rêve tout ce qui lui arrive, que tout cela n’est jamais arrivé, et que la réalité n’est pas celle qu’on lit?