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Un siècle de mensonges

·360 mots·2 mins
Jean-Louis Aerts

Le début est juste chiant: on y suit une trentenaire plus ou moins banale, coincée dans une vie étriquée, journaliste, avec un contrat intérimaire sans réel intérêt et ni objectifs. Le pire étant les dialogues, où les points d’exclamation anéantissent une ponctuation classique, où chaque personnage est contraint de terminer ses phrases par un “!” (sans quoi, “ des sauterelles à bicyclette, un colibri sur ma tête ou les canards auront des lunettes”). Bref, exaspération qui m’a failli lâcher le livre à la page 14, quand le même nombre de points d’exclamation (que le numéro de page) aura noyé une ponctuation de trois points classiques, qui me laissait penser que chaque personnage ne s’exprimait qu’avec vigueur et excitation. J’avais difficile.

Je n’ai commencé à accrocher qu’à partir du moment où j’y ai trouvé mes repères, et que j’ai réussi à passer outre l’écriture qui ne me convenait pas. Quand l’histoire commence à aborder le naufrage du Titanic (j’y étais pas, mais cela a bercé le cinéma de mon enfant, notamment dans Ghostbusters 2), la catastrophe du Hindenburg à Lakehurst (étudié en cours d’anglais), l’incendie de l’Innovation de 1967 (racontée par mes parents), ou le naufrage du Herald of Free Enterprise à Zeebrugge (qui a hanté mes citytrips de jeunesse à la côté belge).

En fait, j’ai commencé à accrocher au moment où les quelques clichés descriptifs, où les dialogues ont commencé à se fondre dans l’histoire, au moment où cette même histoire a commencé à jouer aux montagnes russes nostalgiques, et où j’ai pu raccrocher des morceaux à des “ah mais oui, ch’connais!”[^1].

Au final, on se retrouve avec un thriller psychogénéalogique captivant, entre Le Soleil des Scorta et What Remains of Edith Finch, où mes propres notes m’ont autant servi que les quelques informations distillés pingrement par un vieux bonhomme manipulateur, le tout étant entrecoupé de morceaux sans aucun rapport avec l’histoire, jusqu’à la toute fin (parce que quand on pense avoir tout compris, il reste plus ou moins trois championats du monde de trampoline scénaristique), où on comprend enfin le joyeux bordel qu’auraient été les fêtes de fins d’années familiales.

[^1] Flupke, j’ai mis un point d’exclamation !